Vendredi 1er avril 2016 | Le sentier de l’eau à Varages, spéléologie
Aujourd’hui, c’est Pierre, animateur de la Maison de l’eau, qui nous a expliqué le lien entre les habitants de Varages et l’eau. C’est près d’un canal qu’il a commencé, canal autour duquel Varages s’est bâtie et qui apportait le précieux liquide aux agriculteurs, aux moulins… L’eau s’écoule de la source à sa destination grâce à un réseau de canaux placés légèrement en pente pour l’amener le plus loin possible.
Devant le vestige d’une roue à godets, Pierre nous a expliqué un ingénieux système : la roue déversait de l’eau dans un petit aqueduc, canal perché qui l’amenait vers un bassin plus haut. L’eau débordait et retournait vers le bassin principal. Ici, l’eau était utilisée comme décor.
Cette roue a été détruite car trop de calcaire, déposé durant des années de service, s’y était accumulé.
Nous sommes montés vers la source. Des tuyaux aspirent l’eau qui vient du sous-sol vers une petite station de potabilisation puis elle redescend du réservoir vers toutes les maisons du village et les fontaines. Un périmètre de protection rapproché autour de la source ainsi qu’un périmètre de protection éloigné, appliqué aux maisons alentours (connectées aux tout-à-l’égout), assurent de préserver la qualité de l’eau.
Il y a bien longtemps, des moines auraient transformé les lieux pour en faire un village. La zone, marécageuse, a été asséchée en construisant un canal pour pouvoir bâtir et cultiver.
Des martelières, volets métalliques actionnés manuellement et disposés sur le trajet de l’eau, répartissent l’eau entre différents canaux et permettent aussi de les nettoyer.
Devant la faïencerie Saint-Jean, nous avons appris que l’on lavait l’argile pour enlever les impuretés (grains de sable…), qu’on la laissait décanter dans des bassins pour obtenir de l’eau avec une argile très fine. La chaleur du soleil évaporait l’eau et l’argile pouvait servir à la fabrication de belles assiettes. Varages a connu dans le passé 16 fabriques de faïences, dès le XVIème siècle. Mais la concurrence des faïences moins chères venues d’ailleurs – du Portugal notamment – a condamné l’activité et seule une coopérative, créée par d’anciens employés des faïenceries, persiste à Varages.
Sur le chemin qui nous a menés vers le centre du village, d’anciens prés ont été convertis en terrains constructibles.
Pierre nous a montré la fontaine de la place de la Libération. Les canons des fontaines, d’où sort l’eau, doivent être placés plus bas que l’altitude de la source. Ici, ils sont à notre hauteur. La fontaine servait à boire, se laver…
Dans une ruelle, des maisons sont étroites. Une clé de voûte indique « 1651 » : la maison a plus de 300 ans ! C’est la rue du Four, qui menait au four à pain. Une fontaine y est installée, elle servait à la préparation de la pâte à pain.
Plus loin, sur l’ancienne place du marché, au sommet d’une fontaine octogonale, trône le buste de l’ancien maire de Varages, le médecin Arlaud. Autour des canons, des mascarons, petits masques en forme de tête de lion : par ce symbole, issu de la famille des Vintimille, le village affirme son identité, son eau est une richesse.
Pierre nous a emmenés ensuite aux abords de la falaise sur laquelle Varages est construite. Dans le plus vieux quartier du village, les maisons venaient au ras de celle-ci. Trop dangereuses, elles ont été rasées et la place où nous nous trouvions a été bâtie sur les gravats. Varages est un village perché avec une source et un réseau d’alimentation en eau développé.
Sur la place de la République, où se trouve la mairie, une fontaine possède les plus hauts canons du village. Les visages qui y sont gravés représentent les saisons. On trouve souvent dans les villages une « fontaine aux quatre saisons », symbole de richesse, de fertilité.
Dans la descente des Moulins, sur le côté de la mairie, des affiches indiquent à chaque habitant propriétaire d’un jardin son « tour d’eau », c’est-à-dire son créneau d’arrosage. A lui d’actionner les martelières, parfois en pleine nuit !
Une papeterie profitait également de l’eau, qui mettait en mouvement un axe faisant monter puis tomber un marteau sur de vieux chiffons en coton récupérés par le chiffonnier. Ainsi broyés avec de l’eau, les fibres végétales formaient une pâte à papier.
Nous sommes arrivés dans un ancien moulin, ou plutôt ce qu’il en reste… Un surplomb de la falaise, peut-être gorgé d’eau d’arrosage, a cédé et s’est effondré sur le bâtiment, le détruisant. Cette falaise est formée d’une roche calcaire poreuse et tendre : du tuf. Cet accident a signé la fin de l’activité des moulins car les roches de la falaise, friables, ont été jugées trop dangereuses pour les bâtiments construits à sa base.
Au niveau d’une cascade, plus bas, les végétaux se transforment en roches : l’eau qui circule dessus dépose des couches successives de calcaire, de 10 à 20 cm par an ! Des lignes visibles sur les dépôts permettent de compter les années.
Au-dessus de la falaise, existait un marécage. L’eau débordait et le calcaire emprisonnait les végétaux, les arbres, le sable… donnant à l’ensemble un aspect d’éponge. La falaise, large de 400 mètres, contient 20 à 30 mètres d’épaisseur de tuf. Cette roche est sèche aujourd’hui car l’eau n’y coule plus, les canaux asséchant le milieu.
Un autre ancien bâtiment a été un moulin à huile, puis un moulin à blé pour terminer son activité en scierie. La révolution industrielle (moteurs, électricité) a mis fin aux activités de Varages liées à l’eau car les communes environnantes qui n’en avaient pas ont eu l’énergie qui leur manquait pour être autonomes vis-à-vis de ces activités.
Avec Thierry et Philippe, de l’association SPELE-H2O, nous avons consacré notre après-midi à l’exploration d’une rareté : une grotte dans la falaise en tuf. Difficile d’expliquer son existence mais tous les varageois la connaissent : nous avons pu lire sur les parois des signatures vieilles de 200 ans !
Philippe nous a d’abord expliqué le fonctionnement de sa lampe fonctionnant à l’acéthylène : le gaz est produit par une réaction entre des cailloux de carbure de calcium et d’eau. Mais la nôtre était équipée de leds.
Equipés de combinaisons de spéléologue, nous avons visité les trois salles de la cavité. Nous y avons retrouvé le tuf, prenant des aspects lisses, spongieux, en chou-fleur…
Les lignes horizontales sur les parois montrent que l’eau a occupé la cavité jusqu’à mi-hauteur mais l’assèchement du sommet de la falaise a vidé la cavité. Des stalactites se sont formées par ruissèlement lent de millions de gouttes d’eau de pluie qui ont voyagé à travers le massif.
Des chauves-souris occupent les lieux. Les petits mammifères sont capables de se déplacer dans le noir par écholocation (ultrasons répercutés par les parois), s’accrochent aux aspérités du plafond le jour et sortent la nuit pour chasser les insectes dont elles se nourrissent.
Nous avons ensuite fait le noir complet en éteignant nos lampes et fait (à peu près…) le silence pour écouter les gouttes tomber.
Fin de la visite et retour vers le bus : le séjour dans le Verdon est fini ! Il faut rentrer. Heureusement, nous aurons les vacances pour nous reposer.
MERCI A LAURENT, PIERRE, PHILIPPE, THIERRY, LA MAISON DES LACS POUR LEURS ANIMATIONS TRES INSTRUCTIVES !
MERCI EGALEMENT A RAPHAEL ET ELODIE, LES ANIMATEURS QUI NOUS ONT ACCOMPAGNES.